Ce
Un besoin de me retrouver avec moi-même, de prendre du recul face au mouvement collectif, de vivre à un autre rythme et en communion avec la nature. Et une envie de découvrir autrement mon propre pays.
Après m’être détachée de mes impératifs matériels et administratifs, je pars le 1er Mai 2014, de Saint Jacques des Arrêts, avec l’essentiel sur le dos. Dans le sac, chaque gramme compte, et je m’aperçois vite que ce que je crois être l’essentiel est encore de trop. On apprend vite à se séparer du superflu.
Originaire à la fois du milieu agricole et viticole, je ne savais pas vraiment où j’allais ni ce qui m’attendait, mais je savais d’où je venais. Et sur mon chemin, mes pensées allaient souvent à ceux grâce à qui cette expérience se réalisait.
Depuis le nord ou le sud, il y a autant de chemins de Compostelle que d’individus. J’ai fait le mien en solitaire, même si sur ce chemin on n’est jamais vraiment seul. J’aimais me retrouver, aller à mon propre rythme. Certaines rencontres ont aussi été la source de ma motivation à continuer, à aller toujours plus loin pour le plaisir de les retrouver.
Sur le chemin, pas de division. Il n’y a plus de cadres, ni ingénieurs, ni médecins ni ouvriers. Nous sommes tous égaux, avec les mêmes difficultés, chacun avec sa propre sensibilité et son défi.
Faire ce chemin seule, c’est être disposée aux rencontres, apprécier les portes ouvertes, les plus simples mais les plus chaleureux accueils. C’est aussi avoir le temps et la disponibilité pour s’émerveiller du plus banal des détails. Car ce qui rend ce chemin extraordinaire, c’est justement tout son ordinaire.
C’est au fil des pas et des kilomètres que s’est installé un tout autre mode et rythme de vie. Je me consacrais uniquement à l’instant présent, tout en gardant mon objectif. Les priorités du quotidien devenaient élémentaires : manger, dormir, être attentive à mon corps et savourer les plaisirs simples.
Je suis arrivée le 10 Juillet 2014 à Santiago de Compostella. Des milliers de personnes rencontrées, de toutes nationalités, âges et classes sociales.
1875 kilomètres, 71 jours et 66 couchages différents, 13 régions traversées, 2 pays frontaliers, 8 kg sur le dos à l’arrivée, 1 paire de baskets épuisée et aucune envie de rentrer… S’est alors ouvert en moi la porte d’un nouveau chemin, enrichi de chaque rencontre, échange, passage et moment de recueillement avec la nature. Un sentiment de liberté : le chemin de ma vie est entre mes mains et tous les chemins sont possibles.
Marilyne SANGOUARD