Médecin généraliste en milieu rural « On touche à tout! »

C’est surtout le désir d’aider les autres qui a amené Joël Parisot à entreprendre une dizaine d’années de médecine. Il reconnaît qu’il faut vraiment consacrer sa jeunesse, renoncer à beaucoup de choses : heures de sommeil, loisirs, tellement le programme est vaste. Mais, de son point de vue, « c’était hyper passionnant. Les études sont bien faites en France. »

Dans les dernières années de son cursus, comme interne, il a cependant trouvé le temps de se marier et d’avoir deux enfants (il en a trois maintenant). «?En tant que médecin, on sait qu’il ne faut pas attendre trop tard pour avoir des enfants!?»

Une vision positive des patients

Il vient de fêter ses 20 ans d’exercice à Matour. Il a succédé au docteur Dassonville. S’installer dans le milieu rural, ce fut un choix délibéré. Fils d’agriculteurs, il dit apprécier les gens de la campagne, naturels, pratiques, réfléchis, raisonnables, ne consultant pas pour le moindre bobo. Il parle de ses patients d’une manière chaleureuse, valorise le bon sens de la majorité d’entre eux. Ils lui font confiance tant sur le plan diagnostique que sur le plan thérapeutique.

On fait de tout

Il regrette de faire moins de visites à domicile qui lui permettaient de mieux connaître les gens, leur milieu de vie. C’est aussi ce désir d’appréhender la personne dans sa globalité qui lui a fait choisir la médecine générale. «?On touche à tout, on fait des choses qu’on ne fait plus en ville?», où on s’adresse plus facilement aux spécialistes.
Il situe ses interventions selon trois directions. Les gestes techniques qu’il a appris à faire avec de plus en plus d’assurance : suturer une plaie, poser un stérilet… Le domaine de la réflexion : ajuster, équilibrer un traitement, en tenant compte de l’ensemble des pathologies, des effets secondaires, des réactions du patient. L’écoute de la personne, de son vécu, de ses soucis familiaux ou autres. Il continue aussi à se former pour acquérir de nouvelles compétences.

Le parler vrai du médecin

Question importante: faut-il toujours dire la vérité au malade, quelle que soit la gravité de la situation ? Il répond positivement. Cacher les choses, c’était dans le passé «?une autre médecine?». Parler permet d’ouvrir le dialogue, de «?décongestionner?». Souvent, le patient est plus prêt à entendre qu’on pourrait le croire. Le fait de comprendre pourra lui permettre de mieux lutter.
Tout cela demande une grande disponibilité: 70 heures de travail et une nuit de garde par semaine, un week-end sur six. Le docteur Parisot aimerait pouvoir consacrer plus de temps à sa vie de famille, faire du sport pour soigner sa propre santé. Mais, malgré la fatigue et parfois le stress, il ne regrette pas son choix de vie. Il est récompensé quand, le soir, il peut dire : «?Je suis content de ce que j’ai fait!?»

Récits autour d’un territoire et ses hommes…

17830 ha, 5648 habitants, une densité de 31,6 habitants/km², ces trois chiffres donnent les dimensions des treize villages
aux treize clochers formant la paroisse des Saints-Apôtres que nous ont donnés à lire depuis décembre 2009 les treize
numéros de la revue Le haut Clunisois. Paris intra-muros fait 7290 ha de moins, 2,2 millions d’habitants de plus, et la densité est de 20873 habitants. Notre territoire est rural s’il était encore besoin de le démontrer!

Des convergences et des différences… Notre territoire est rural et tous les interviewés affirment leur fierté de cette ruralité, avec un zeste «?d’un peu plus?» dans les villages de moins de 400 habitants où le côtoiement population-agriculteurs va de soi. Le bourg, un peu plus grand que les hameaux, mais le plus souvent modeste, aide aux contacts, et même au bourg, la nature est là, vallonnée, avec son paysage de bocage tout proche, partout visible. On se côtoie, on se salue, on se parle, encore faut-il préserver les occasions qui le permettent. Elles tiennent aux écoles fédérées par les trois RPI de la Noue, des Grosne, des Quatre saisons. A l’entrée et à la sortie des écoles, il y a brassage des parents, et les cars scolaires contribuent à ce que les enfants des villages et des hameaux se connaissent mieux. Les cantines – s’approvisionnant, dans la mesure du possible, auprès des commerçants locaux et parfois en produits bio -, ne sont pas non plus étrangères à tous ces allers et venues qui égaient le bourg trop calme surtout en hiver. Les bibliothèques municipales, là où elles existent, comptent aussi comme lieu de rencontre, et les quelques commerces également. Les associations sont partout nommées pour leurs animations qui entretiennent la vie, ne serait-ce qu’un bourdonnement, et permettent les retrouvailles ainsi que la créativité dans les moments des organisations de leurs manifestations. Il est à remarquer que les habitants sont de plus en plus conscients que toutes les infrastructures, les bâtiments et l’organisation des transports scolaires sont liés à ce quotidien qui fait la vie et l’avenir de nos villages. Tout ceci favorise les rencontres entre les anciens et les nouveaux habitants. Ces compétences appartiennent aux entités communautaires dépassant le cadre de la seule commune que sont les Comcoms (communautés de communes), les SIVOS (syndicat à vocation scolaire), et le SIVU (syndicat intercommunal à vocation unique) pour les haltes garderies, garderies périscolaires et accueil de loisirs. Si l’on souhaite encore plus de vies au sein même de la communauté villageoise, chacun se réjouit que nos villages n’en soient pas pour autant isolés. Proches de la voie rapide, ils sont reliés à Cluny, à Mâcon, aux autoroutes, au TGV, élargissant ainsi le bassin d’emploi de Pari-Gagné – Matour avec Palmidor (groupe LDC) et la Fonderie. Ces proximités ne sont pas sans avoir pour effet l’installation dans le pays de nouveaux habitants, qu’ils soient salariés, ou artistes et artisans aux métiers parfois originaux. Cette dernière convergence, tous nos villages de moins de 400 habitants, les plus importants, Dompierre, Matour et Tramayes, la font leur, même s’ils sont villages-bourgs, une différence de taille au propre et au figuré d’avec leurs semblables ruraux. L’animation de la rue tient à leurs commerces nombreux, à leur collège, à leurs structures médicales, à leurs offices du tourisme des deux communautés de communes, à leurs possibilités d’hébergements touristiques, et bien sûr au fait qu’ils drainent pour les courses et les services, les habitants des villages alentour.

Le dernier testament de Ben Zion… à lire avec circonspection

Fallait-il vraiment lire ce roman de James Frey? Choquant… pour tous les croyants de toute confession, juive ou chrétienne. Sans jamais s’exprimer vraiment Ben Zion les remet toutes en cause et les critique toutes. Choquant… pour tous ceux qui essaient de donner un sens moral à leur vie en dehors de toute religion!

Mais qui est Ben Zion? Rien moins que le messie réincarné. Un messie qui vit à l’encontre de toutes les lois. Mais, me direz-vous, Jésus bravait les interdits et les règles de la loi juive, il fustigeait les pharisiens… chassait les vendeurs du temple, guérissait le jour du Sabbat. Alors, que reprocher à ce nouveau messie ? Il fait plus penser à un gourou mais ne cherche pas à retenir ceux qu’il a attiré et à qui il ne demande pas d’argent. Un nouveau prophète qui vit pauvrement dans un quartier peuplé majoritairement de Portoricains, le seul blanc parmi tous ces gens de couleur, «?ce qui n’a pas l’air de le gêner.?»
Le roman est construit en seize chapitres autour de quatorze personnages qui, chacun avec leur style, livrent leurs impressions à la rencontre de Ben Zion. James Frey essaie de les faire coller à des personnages bibliques. C’est cela d’abord qui m’a heurtée, j’avoue n’avoir jamais vu Jean-Baptiste sous les traits d’un trafiquant en tout genre, à la tête d’une armée de pauvres types à qui on fait croire n’importe quoi pour avoir à manger!
L’évolution de Maria angeles, alias Marie-Madeleine, est sûrement ce qui est le plus intéressant. Au cours de son enseignement, il remet en cause le pouvoir abusif des religions, leur volonté de maintenir les gens dans la peur, les livres saints : «?Il faudrait considérer ces livres de la même manière que nous considérons tout ce qui est de la même époque, en reconnaissant leur importance historique, mais sans leur accorder la moindre valeur.?» Dieu est infini, Dieu est Amour, tel est le fond de son enseignement, mais c’est justement sa vision de l’amour qui pose question : dérive vers des rapports sexuels multiples, puisque c’est au cours de l’orgasme que Dieu se manifeste! C’est en cela que l’on pense plus à une secte, essentiellement à partir de la rencontre de Judith, le douzième personnage.
Ce qui rend ce roman encore plus pénible à lire c’est le style. Pour coller au plus près de ces personnages, James Frey emploie leur langage souvent vulgaire, voire ordurier. J’avoue avoir eu beaucoup de mal avec certains chapitres. En réfléchissant à ce qui a pu pousser cet auteur américain à se lancer dans une telle « entreprise », je me suis dit que sans doute, la multiplication des églises aux Etats-Unis et l’emprise de la religion sur la vie politique et publique de ce pays devait être le mobile de l’auteur. Mais peut-être en est-il tout autre. Cela dit, je reviens à ma première interrogation: fallait-il vraiment lire ce roman?

Je me souviens…

n°87 – mars 2013

Votre curé fait partie de la génération qui a eu la joie de participer, il y a maintenant 50 ans, à la découverte – redécouverte pour beaucoup – des fêtes de Pâques, précédées de la Semaine Sainte. Bonne nouvelle pour les jeunes prêtres d’alors, d’une liturgie qui ne serait plus réservée aux moines et religieux mais ouverte au plus grand nombre (tous?) des fidèles. J’ai le souvenir de cette veillée où se côtoyaient, à l’initiative de jésuites, des jeunes universitaires futurs cadres et dirigeants des entreprises et grandes administrations de l’Etat français avec des réfugiés d’Amérique latine, notamment chiliens et argentins, qui fuyaient les dictatures de leur pays, et aussi des Libanais et autres chrétiens des pays du Moyen Orient, heureux de pouvoir marcher dans la nuit de Pâques vers la chapelle spacieuse, devenue soudain trop exigüe, sans avoir à craindre de mauvais coups de qui que ce soit. Et tous réunis pour fêter Jésus, le toujours vivant! Le fêter comme celui qui nous invite à donner sens, avec lui, à nos vies ! On a pris l’habitude de faire des cadeaux à Noël. Pourquoi pas à Pâques? Une bonne occasion nous est offerte avec la parution du livre de François d’Alteroche que nous avons appris à connaître, avec les Andins du Pérou, comme Mgr Paco: Des monts d’Aubrac au cœur des Andes, 50 ans en Amérique Latine, éditions Karthala.

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François d’Alteroche, Monseigneur Paco, deux noms, une vie !

Pour comprendre l’histoire d’un peuple, un seul homme dont la vie est unité ! Né dans les terres belles mais rudes de l’Aubrac, il est devenu un homme tout donné à la cause de l’Evangile et des pauvres en Amérique Latine, terre rude et pauvre. Monseigneur Paco, que certains d’entre nous ont eu la grande joie de rencontrer, vit au Pérou après avoir passé vingt ans en Argentine. Entièrement donné à l’évangélisation dans la rencontre du monde rural andin, il vient d’écrire un livre remarquable d’humanité, de vérité et d’interpellation pour nous qui sommes dans un pays où l’on ne vit pas si mal qu’on le dit. Je vous recommande cet ouvrage qui, lorsqu’on se plonge dans sa lecture, ne peut nous laisser indifférent et nous permet de mieux comprendre ce peuple andin du Pérou, ainsi que les enjeux politiques et historiques de ce pays. Alors n’hésitez pas : offrez-vous ce livre !

Françoise Olislaeger

Le tour des villages se poursuit !

Fin 2009, nous avons décidé de mettre en valeur chacun des treize villages de la paroisse, et d’après les échos reçus au fur et à mesure, vous avez apprécié ce choix. Réalisé parles bénévoles qui travaillent à ce bulletin, dans les limites d’une double page qui ont pu paraître parfois un peu trop contraignantes, chacun/e, avec sa personnalité, a contribué à cette série de «?portraits?» de villages à travers les rencontres auxquelles nombre d’entre vous ont participé. Soyez en remerciés! Est-il possible d’aller un peu plus avant et, après la lecture, village par village, de tenter une relecture de l’ensemble ? D’en dégager des perspectives qui,tout en prenant de la distance, donnent encore plus à aimer ce pays où nous vivons ? Un groupe de volontaires a relevé ce défi amical. Bernard Cateland et Martine Magnon en proposent la synthèse. Comme il fallait s’y attendre, le fruit de leur travail, ne pourra pas paraître en une seule parution car nous tenons à garder un équilibre dans les contenus de chaque numéro.Rendez-vous est pris pour la suite et la fin dans le prochain numéro n°?88! En voici d’ores et déjà les têtes de chapitre : «?Des villages et leur spécificité?» et «?Complémentarité et solidarité?».

Tant d’étrangers sont en situation irrégulière !

Le Réseau d’Education Sans Frontières a été créé en 2004 à l’initiative de parents et d’enseignants qui aident et militent pour la régularisation des familles sans-papiers dont les enfants sont scolarisés et parmi eux, des jeunes majeurs sans papiers. Rencontre avec Iain Simpson Smith, un militant convaincu…

L’aide aux étrangers en situation irrégulière, c’est le quotidien de Iain Simpson Smith, militant à la Ligue des Droits de l’homme et membre de RESF. «?Notre réseau de bénévoles, nous dit Iain, qui compte une trentaine de militants actifs et plusieurs centaines de membres dans tout le département, a été constitué en septembre?2006, avec trente-deux organisations membres- associations,syndicats et partis politiques.Il a été mobilisé dès mars?2007 à Cluny lors de l’arrestation brutale, la mise en centre de rétention et l’expulsion d’une Camerounaise vivant dans le clunisois.?»

Accueillir et accompagner les demandeurs d’asile

L’objectif du RESF, comme celui d’autres associations telles que le Secours catholique, la Cimade, la Ligue des Droits de l’Homme, les amis de CADA et tant d’autres, est d’aider ces étrangers qui souvent se débattent pour venir ou rester en France. «?Notre aide, c’est les accueillir, les accompagner dansles démarches administratives, les aider à établir les dossiers, étudier les recours… mais aussi, informer le public, interpeller les responsables publics et manifester pour que leurs droits fondamentaux soient respectés!?»

Des actions publiques pacifiques

Vous avez vu peut-être les samedis au marché à Cluny ces cercles de silence, une belle façon non-violente de protester contre l’injustice. «?Je pourrais, dit Iain, vous citer tant de cas dramatiques dans le département : l’expulsion éclair de Philomène, étudiante malgache, après son assignation à résidence; Naïma, jeune Algérienne menacée d’expulsion, qui a fait une tentative de suicide; Helena, Angolaise déboutée du droit d’asile, qui s’est retrouvée à la rue avec ses deux enfants.?» Mais il y a aussi, heureusement, des dénouements positifs, comme la régularisation, après un long combat mené par son comité de soutien, d’Adil, jeune Marocain né en France mais ayant passé son enfance au Maroc, et à qui l’administration française n’avait pas accordé de titre de séjour lorsqu’il était venu, à l’âge de 16 ans, rejoindre sa famille installée à Mâcon… ou encore le retour et la régularisation d’Ilyes, jeune lycéen à Montceau, dont l’expulsion vers l’Algérie alors qu’il venait d’avoir 18 ans avait scandalisé ses parents, ses collègues de classe, ses professeurs et le député-maire de Montceau. «?C’estbien au nom de ces valeurs que nous exigeons le respect des droits humains et que nous trouvons insuffisantes, par exemple, les mesures proposées dans la récente circulaire Valls?», s’insurge Iain Simpson Smith.